Quand on est dirigeant, cadre, manageur, demander du feedback n’est pas notre premier réflexe et pourtant …. Dans mes conversations avec les DRH, Cadres et Dirigeants, j’entends beaucoup parler de feedback, surtout en fin d’année…

Le feedback : Un rituel clé dans l’amélioration continue… de qui ?

C’est un rituel important dans la démarche d’amélioration continue des collaborateurs, qui ne va pas sans quelques difficultés et des décisions à prendre :
– Quelle est la fréquence pertinente ? Mensuelle ? Hebdomadaire ? En continu ? … clairement, le rituel deux fois par an disparait progressivement, et c’est tant mieux,
– La continuité ou pas : ne pas attendre et dire ce que l’on a à dire devient parfois la règle, au risque de tomber dans une évaluation permanente qui peut être lourde à donner et recevoir, (rappelons au passage que le feedback et l’évaluation sont, ou devraient être, deux actions différentes),
– Le contexte : on the job, ou de façon plus ritualisée.

Feedback : Un résultat démotivant dans 38% des cas.

Le point sous-jacent à ces discussions, c’est le résultat, qui n’est pas toujours à la hauteur de nos attentes. Si notre rêve est que le collaborateur en sorte grandi et plein d’énergie, une enquête d’Avi Kluger dans les années 2000 suggère que le feedback, positif ou négatif est démotivant dans 38% des cas… bien sûr le temps a passé, nous n’en connaissons pas moins beaucoup de cas où nous sommes démotivés par un feedback inapproprié ou pas, d’ailleurs.

Aurez-vous l’audace de repenser le feedback?

Il s’agit encore trop souvent exclusivement de feedback descendant, du manageur vers le collaborateur. Et c’est là mon point du jour… Êtes-vous prêt à repenser le feedback comme un outil de développement personnel et de professionnalisation de soi ?
Demander et recevoir du feedback, c’est un outil essentiel du self-management.

La sagesse populaire – légèrement obsolète dans sa tournure – nous rappelle que Charité bien ordonnée commence par soi-même… et pourtant bien peu des manageurs et dirigeants font spontanément la démarche de demander du feedback eux-mêmes, qu’il soit d’ailleurs ascendant, descendant ou venant de leurs pairs. A l’heure où l’équité est au coeur de nos relations humaines, commençons par nous l’appliquer à nous-même.

5 raisons pour demander du feedback

  1. L’équité : « j’en donne, donc j’accepte d’en recevoir » ; Ma proposition est même d’avoir l’audace d’en demander.
  2. Progresser et booster son propre développement : comprendre comment nous sommes perçus, permet d’élargir notre connaissance de nous-même et nous ouvre la voie à une démarche de progression.
  3. Bénéficier d’observations concrètes,vécues et des suggestions actionnables : vos collaborateurs sont les mieux placés pour vous dire leurs attentes.
  4. Identifier ses points forts, les transformer en territoires d’excellence et nourrir sa confiance en soi.
  5. Renforcer la performance collective, solidifier la confiance mutuelle et améliorer considérablement les processus ensemble.



8 étapes pour aller chercher du feedback concret, actionnable et … recevable.

#1. Quel sujet?

Identifier le ou les sujets sur lesquels un feedback est souhaité, définir avec précision la situation, le contexte, la prestation, l’action que l’on souhaiterait améliorer. De la précision de notre démarche, dépend la qualité du retour obtenu.

#2. Quelles questions ?

 Rédiger ses questions, bien choisir ses mots. Une étude de 2019 montre que demander un conseil, est plus précis et actionnable que demander du feedback. 200 personnes ont été sollicitées pour réagir à un dosser de candidature. La moitié a reçu une demande de feedback sur le dossier et l’autre moitié une demande de conseil sur le dossier. Le groupe ayant été appelé à donner des conseils, a donné 34% de plus d’axes d’améliorations et 56% plus d’idées concrètes.

Voici quelques suggestions :

a. Quels sont les points forts de mon travail ? Si je dois améliorer un point, ce serait lequel en priorité ?
b. Comment puis-je faire pour que notre collaboration (notre relation professionnelle) soit plus constructive (utile, performante, …)
c. Que puis-je faire pour mieux t’appuyer dans ton travail ?
d. Qu’appréciez-vous chez moi, et que vous aimeriez voir plus souvent ? Y-a-t-il des points  moins positifs, ou qui ont un impact négatif sur vous, sur notre relation de travail ?
e. Qu’est ce qui ferait de moi un meilleur … manager, collègue, parent, conjoint, … ?
f. Que pensez-vous de mon projet ? Quelle serait pour moi la prochaine étape ?
g. Avec tout ce que vous connaissez de moi, qu’attendez-vous de moi dans un futur proche, Avez-vous des suggestions pour moi pour la suite de notre collaboration ? (basé sur le FeedForward, qui consiste à ne pas s’attacher au passé, mais plutôt à recueillir des conseils et suggestions pour la suite)

#3. Ne tirez pas sur le messager!

Créer un climat de confiance avec une absolue sincérité. Demander un feedback, en particulier à un collaborateur, nécessite de créer un espace de sécurité, de rassurer sur la sincérité de la démarche et l’absence absolue de conséquence négative pour la personne (si vous ne pouvez pas vous engager à ne pas « tirer sur le messager », laissez tomber !)

#4. Savoir Choisir !

Faire des choix : choisir son moment, choisir les personnes pertinentes par rapport au sujet ou au comportement que vous cherchez à éclairer.

#5. Clarifier

Dans la conversation, relancer et clarifier pour avoir des réponses concrètes, actionnables :

a. Peux-tu élaborer sur ce point ?
b. Pouvez-vous m’en dire plus à ce propos ?
c. Peux-tu m’aider à comprendre…,
d. Qu’est-ce que je pourrais faire concrètement ?

#6. Ecouter, c’est ne pas parler

Dois-je développer ? Écouter avec le cœur, avec sincérité. Écouter, c’est se taire, ne pas interrompre, ne pas se justifier, ne pas consulter son portable. Écouter c’est se concentrer sur l’autre, le regarder, lui sourire et ouvrir ses oreilles et son cœur.

#7. Remercier

Répondre sans se justifier. La réponse au feedback n’est pas une réponse comme les autres, c’est une réponse de gratitude, qui accuse réception, qui dit « j’ai bien entendu », remercie, et donne de l’importance à ce qu’on a appris. Pour ce faire, ne pas commenter, ne pas se justifier, (oui je le répète, au cas où… :). Eventuellement reformuler, poser des questions ouvertes (voir plus haut) et surtout remercier. Ma recommandation est de ne pas se mettre tout de suite dans l’action, et de ne pas conclure sur des pistes d’actions. C’est trop tôt pour aller aux solutions. Le feedback est très précieux, il convient de l’intégrer, de le comprendre avant de murir un plan d’action :

#8. Se mettre au travail sérieusement

Établir un plan d’action et suivre les progrès : le travail commence maintenant. Prendre le temps de noter (oui par écrit) ce qui a été offert. Établir un plan d’action, et travailler. S’engager dans une demande de feedback, c’est aussi créer une attente, il s’agit donc de se mettre sérieusement au travail. Partager son plan d’action, faire parfois un point d’avancement avec les personnes qui ont eu la générosité de partager leur point de vue peut être un suivi très utile, pour soi et pour la relation.

N’oubliez pas la préparation mentale!

Se mettre dans un état d’esprit favorable, et donc s’appuyer sur quelques qualités fortes :
– Sincérité de la démarche
– Précision des demandes, Inscription dans le concret,
– Écoute active, concentrée,
– Gratitude envers la générosité de celui/celle qui se lance à vous aider,
Management de ses émotions (se tenir prêt à recevoir des critiques, parfois maladroites, et savoir les accepter sans s’énerver)

Le feedback, c’est précieux.

Le feedback que nous demandons est probablement l’un des outils les plus précieux de self-management. Nous sommes à la manœuvre, nous sollicitons et sommes donc prêt à écouter.
Le feedback, demandé et donné avec pertinence, est très différent du jugement ou de l’évaluation. Il ne s’agit pas de juger une personne (vous), mais d’observer, d’analyser ses actions, ses attitudes, dans un contexte donné, et d’en faire un retour aussi simple et neutre que possible, basé sur des faits et exemples clairs et précis.

SOYEZ AUDACIEUX.

Mon conseil d’amie pour la fin, tentez l’aventure de demander du feedback dans votre cercle privé, vos enfants, vos conjoints sont une magnifique source de retour. L’amélioration de la vie familiale ou amicale est significative et bien souvent, les conseils de nos enfants sont très transposables dans notre vie professionnelle.

Stephanie.



Quelques lectures autour du feedback

– Total Leadership, Stew Friedman,
– Learn to solicit feedback from your kids. S.Edinger – HBR 2019
– How to ask feedback about creative work creative. S. Harrison. HBR 2017
– The power of listening in helping people change. G. Itzchakov & A.N. Kluger. HBR 2018
– How leaders can get honest, productive feedback. J. Porter, HBR 2019
– Why asking for advice is more effective than asking for feedback J. Yoon, H. Bluden & AL. HBR 2019
– You need a personal highlight reel. D. Cable. HBR 2020.
– FeedForward, MarshallGoldsmith.com