on boarding comme une investigation

Nouveau dirigeant , un on-boarding réussi c’est comme une investigation : découvrir le caché, le non-dit, lire entre les lignes. A cela, s’ajoute une dimension personnelle forte. C’est le moment ou jamais de prendre soin de soi, de son entourage si précieux et de son intelligence émotionnelle ! Tout un programme très excitant. Dirigeant, à vous de jouer, c’est aussi votre job de réussir votre on-boarding.

La joie de la nomination peut vite nous aveugler. Les chiffres nous rappellent à l’ordre :

D’après une étude sur près de 700 sociétés listées dans 13 pays d’Europe de l’Ouest et aux USA, 67% des nouveaux CEO sont issus du sérail . Croire que l’environnement est déjà bien maitrisé est une erreur fréquente.

58% des nouveaux seniors executives recrutés à l’extérieur ne performent pas.

En France, 33% des cadres ont déjà quitté un job à cause de l’absence d’accueil approprié. D’après cette même étude, seulement 46% disent avoir été accueilli avec un programme construit.

Enfin, lorsqu’un programme d’intégration est organisé (seulement 50% environ, en France), il touche principalement l’organisation et les process. Pourtant les principales difficultés exprimées par les nouveaux recrutés se relient à la culture et à la création de réseau.

L’on-boarding des dirigeants  n’est pas seulement la responsabilité de l’entreprise. En tant qu’exécutif nouvellement nommé, c’est notre devoir et notre intérêt de réussir notre montée à bord.

Dirigeant: comment s’y prendre pour réussir son on-boarding?

Lisez entre les lignes de la feuille de route & des enjeux

Y-a-t-il une feuille de route et quelle est-elle ? Est-elle partagée ou non parmi vos pairs et vos interlocuteurs ? Quelles sont les attentes non exprimées ?

Venus de l’extérieur ou d’une promotion interne, la compréhension des enjeux est primordiale, et il ne s’agit pas de négliger la partie émotionnelle de l’affaire, dont on ne vous parlera probablement pas spontanément. Comment faire ? Se mettre à l’écoute des signaux faibles, observer, compléter vos interrogations sur les enjeux business et organisationnel du rôle, de questions sur le ressenti lors de chaque rencontre : qu’est ce qui est important pour vous dans notre collaboration, comment sentez-vous les choses ?

Découvrez la biographie du rôle dans sa continuité

Vous êtes nouveau, le rôle ne l’est pas – à moins d’une création de poste. Vous avez votre propre vision, mais qu’en pensent ceux qui ont connus votre prédécesseur et la façon dont il exerçait ce job ? Chacun de vos interlocuteurs a son propre point de vue sur votre rôle.  Vous éclairerez votre position sous un nouveau jour en interrogeant les parties prenantes sur leurs attentes. `

La biographie de votre rôle est la façon dont la fonction a été remplie précédemment.- Lisez Susan Long – Cela vous aidera à affiner votre propre vision de votre job et vous évitera de décevoir en omettant certaines parties, par exemple.

Saisissez les subtilités du système

J’appelle système, l’environnement interne et externe, l’ensemble des parties prenantes plus ou moins visibles qui gravitent autour de nous dans cette nouvelle position.

Prenez le temps de réfléchir et de poser ce système par écrit. Vous pourrez par exemple vous poser quelques questions simples sur les décideurs, les influenceurs, les alliés naturels. Vous pourrez aussi identifier ceux qu’il serait utile de conquérir. Tout cela  aidera à atteindre plus rapidement une compréhension du process de décision écrit et moins officiel.

En externe, une cartographie permettra de poser des jalons auprès des partenaires extérieurs importants et potentiels, et de construire un parcours d’intégration externe.

Enfin, les institutions, parfois hors de notre champ de vision précédent, deviennent une partie prenante essentielle pour répondre à nos nouveaux enjeux.

Apprenez la langue locale : la Culture

Promu en interne, la culture vous est déjà familière, pourtant refaire un point n’est jamais inutile. D’autant que vous aurez probablement à vous poser rapidement la question des inflexions à apporter.

Venu de l’extérieur, la découverte de la culture est un sujet d’attention instrumental.

La culture est un ensemble de « pattern », de modes de pensée et d’action communément admis dans l’entreprise et que les collaborateurs de tous niveaux utilisent pour raisonner, communiquer et agir[6]. C’est parfois tellement ancré que cela en devient invisible pour les personnels présents depuis longtemps. La culture se compose de trois couches :

La première est la partie la plus visible, identifiable par le langage partagé, les symboles.

La seconde, à un niveau semi-visible, plus difficile à identifier se composent des normes et attitudes communément acceptées (le process de réunion, de feedback, …).

Enfin, invisibles et sous-jacentes, se trouvent les croyances, la vision du monde et de l’entreprise et particulièrement tout ce qui touche au pouvoir (bénéfice du titre ? de la séniorité ?), au règlement des conflits ou au système de promotion, par exemple.

Intégrez quelques questions de culture à votre investigation.

A nouveau dirigeant, nouveau réseau !

Je sais très bien ce que vous pensez : ce n’est vraiment pas le moment… Au contraire, c’est justement le moment. Considérez donc chacune des personnes nouvelles que vous rencontrez dans l’entreprise comme une rencontre réseau bien ciblée et qualifiée. Ecoutez, intéressez-vous à elle, à ses aspirations, à ses passions et compétences.

Que de temps gagné lorsque vous aurez besoin de telle ou telle ressource dans l’exécution de votre mission.

C’est aussi le moment d’acquérir des relations à votre nouveau niveau, dans le groupe et en externe. Vous pourrez ainsi saisir le marché, l’image de l’entreprise et celle de votre position vue de l’extérieur. Une bonne façon de nourrir votre inspiration et la construction de votre vision.

Pour réussir son on-boarding : Ecouter

Dirigeant : Réussir son intégration et Ecouter

Écoutez…

et plus globalement développez votre intelligence émotionnelle

Combien de nouvelles recrues avez-vous reçu dans le cadre de leur prise de poste ? Combien ont passé 80% du temps à parler d’elles, de leur ambition, de leur analyse (prématurée) de la situation et des formidables leviers qu’elles vont actionner ?

Essayez un truc vraiment nouveau : ECOUTEZ 80% du temps de vos entretiens d’on-boarding, écoutez 80% du temps en réunion. Oubliez vos idées déjà faites, retrouvez votre candeur, sans jugement.

Un autre truc révolutionnaire ? Posez des questions ouvertes, qui donnent sincèrement la parole à votre interlocuteur. Demandez sa vision du rôle, demandez en quoi vous pouvez l’aider, en quoi elle vous aidera.

La carte de l’écoute et de l’humilité sincère permet, en plus de vous offrir une mine d’information, de poser les premiers jalons d’une confiance qui vous sera très utile.

Une autre dimension d’intelligence émotionnelle à surveiller particulièrement : l’envie d’agir tout de suite. Reprenez le contrôle de vos impulsions, ce n’est pas le moment d’agir, et faites preuve de flexibilité, laissez-vous surprendre par des perspectives que vous n’aviez pas encore.

Gardez à l’esprit ce qui vous fait dérailler

Sous l’excitation du nouveau job, il y a inévitablement le stress de l’adaptation à cette situation nouvelle, la fatigue liée à la masse de travail et à la disponibilité nécessaire. Le déraillement guette.

Connaitre ce qui vous fait sortir du chemin et adopter un style de leadership que vous n’aimez pas reconnaitre comme vôtre, est essentiel dans ce moment de pression forte.

S’entrainer à repérer les signaux faibles peut s’avérer très utile. A lire absolument comme base de réflexion le travail remarquable de Erik de Haan, the Leadership Shadow.

Equilibre On-boarding dirigeant

On-boarding : Lâcher Prise

Occupez-vous de vous et gardez du temps pour vos proches

Vous êtes l’instrument, ne l’oubliez pas. Alors prenez soin de vous.

Pour être à l’écoute et absorber la masse de data et saisir la complexité de ce nouveau système, vous avez besoin de tous vos sens, de votre forme et d’un cerveau fluide et disponible.

Nos proches sont souvent un point d’ancrage et de stabilité, dans un monde professionnel ou beaucoup de repères ont changé. Donc, prendre soin d’eux, leur consacrer du temps, c’est aussi vous faire du bien. Quand le job aura passé, eux seront toujours là.

Du sport, du temps en famille, avec vos proches pour vous détendre, un peu de marche ou de méditation, chacun sa voie. Trouvez la vôtre.

Et aussi, très important, du temps seul pour rassembler vos idées,

laisser les connections se faire.

Fuir les concepts faux-amis et les injonctions de réussite rapide

Une petite liste des idées et des envies à fuir : « tout se joue dans les 100 premiers jours ». « 90 jours pour tout changer ». Vous êtes pressé? Vous avez envie d’impressionner par votre détermination ou votre pertinence? Votre fonction vous donne le pouvoir? C’est pour tout changer que vous êtes là? Comme je vous comprends. Toutefois …

Ce qui joue dans les tous premiers moments, c’est plutôt l’amorce de relations de qualité, la compréhension des enjeux en profondeur, ou encore la fraicheur de votre regard.

Ce qui ne doit pas se jouer, c’est prendre des décisions trop tôt, c’est à dire avant d’avoir une vision claire ou imposer son point de vue de façon péremptoire et vouloir reproduire ce qu’on a déjà fait.

Relisez Marshall Goldsmith What got you here, will not get you there et l’article éclairant de Sabina Nawaz : The biggest mistakes new executives make.

Bravo pour votre nouveau job.

Vous vous êtes investi pour être nommé, maintenant c’est à vous !

A vous d’avoir un regard critique et stratégique sur le programme d’intégration qui vous est proposé et de l’enrichir de façon réfléchie.

A vous de jouer !

Ecrit par Stephanie Daudier, The Inspiration Lab.

Merci à Sacha Schwarz pour les illustrations.

Pour aller plus loin:

Susan Long – Coaching in Depth, Organizational Role Analysis.

M. Watkins, Your next move, the leader’s guide to major career transition.

Marshall Goldsmith : What got you here, will not get you there.